Né le 11 novembre 1937 à Villeneuve-Saint-Georges (Val de Marne) d’un père casanier originaire d’une ferme en Auvergne et d’une mère parisienne qui avait le goût du voyage. Mes premiers souvenirs de la vie sont ceux d’un monde en guerre. Ce qui explique peut-être ma vie sur la route, cette quête menée sur le terrain pour savoir si les hommes seront un jour capables d’établir la paix.
De 1955 à 1973 : le tour du monde.
Bien entendu je n’avais pas prévu de partir pendant 18 ans, je ne me pensais pas capable de réaliser un tel exploit non plus. Mais le rêve était puissant, la curiosité d’esprit insatiable. Pas de sponsor ni de renseignements à l'époque. Les guides du routard et les charters n'étaient pas encore nés. Le plus gros problème est qu'il n’y avait pas d’argent à la maison. Mon père, échoué en région parisienne comme simple ouvrier à la SNCF avait toutes les misères du monde à élever ses trois garçons. Tout s’est enchaîné malgré moi.
Parti en 1955 à l’âge de 17 ans avec un diplôme de l’école hôtelière et seulement 10 francs en poche, il m’a fallu travailler tout de suite. On ne voyage pas sans argent. J’ai d’abord pensé apprendre les langues étrangères afin de pouvoir communiquer avec les hommes. Dans ce but, pendant sept ans j’ai travaillé dans différents pays d’Europe et j’ai appris ainsi sur place l’anglais, l’espagnol, l’allemand et l’italien. J’ai fait un tas de métiers pour survivre comme téléphoniste, cuisinier, serveur, croque-mort, réceptionniste et même cireur de chaussure en Italie!
Entre l’Espagne et l’Allemagne, j’ai passé deux ans au Congo en 1958 et 1959 pour le service militaire. Sans service, à l’époque, pas de passeport. Et sans passeport, pas de voyage ! Mais j’ai ainsi pu découvrir un nouveau continent et rencontrer le docteur Schweitzer à Lambaréné au Gabon.
Ces premières neuf années de débrouille se sont avérées être des années d’apprentissage fort précieuses pour la suite. Je voulais ensuite apprendre le russe mais il était impossible de travailler en Union Soviétique.
C’est au Canada que j’ai finalement pu préparer le budget de mon périple de 1965 à 1967 comme traducteur à Toronto.
En 1967, à l’âge de 30 ans, ce qui n’est pas l’âge habituel des stoppeurs, j’ai tout abandonné pour réaliser mon rêve de toujours : parcourir le monde. De 1967 à 1973, j’ai sorti mon pouce sur toutes les routes de la terre pendant six ans ininterrompus, ce qui m’a fait parcourir 400.000 km en stop à travers 135 pays avec un dollar par jour. Ce dollar s’explique pour trois raisons :
_ 1) je n’ai pas payé le transport. J’ai même dû faire de l’avion-stop, du bateau-stop, du voilier-stop et du ferry-stop pour traverser les mers gratuitement.
_ 2) je n’ai jamais dormi à l’hôtel sauf une nuit, forcé par l’agence touristique d’état, l’Intourist, à Moscou.
_ 3) tout l’argent passait dans la nourriture et les visas. Mais cette moyenne était si minime que je ne pouvais pas manger dans les restaurants. Je me contentais des carrioles en bord de route ou des stands sur les marchés. Si ce dollar, à l’époque, m’achetait trois repas en Inde, il ne me payait qu’un petit déjeuner en Alaska. J’ai connu « clopinettes » et ramadan !
Ce style de voyage plutôt spartiate me gardait en contact constant avec la population, ce que je cherchais. Contrairement à ce que l’on peut penser ce dollar n’était pas pour mendier mais pour me permettre de garder mon indépendance.
Les aventures et les anecdotes sont sans fins. Je les relate aujourd’hui grâce à une ciné-conférence (j’avais dans mon sac à dos une caméra d’amateur et au lieu de prendre des photos comme tout un chacun, j’ai filmé) et quatre livres que j’ai rédigés à mon retour. Je ne suis pas parti pour écrire des livres ni monter un film mais la providence a eu la sagesse de me faire prendre des images et Laffont m’a demandé d’écrire mon histoire au retour. Comme j’ai un beau message à partager, j’ai pensé que c’était une excellente façon de le faire (voir rubrique bibliographie).
Je me suis retrouvé par exemple, sept fois en prison. Soupçonné d’être révolutionnaire ou guérillero en Amérique du sud, espion dans les pays arabes et en Iran, pirate de l’air en Colombie... Je demandais parfois moi-même à dormir en prison mais dans ce dernier cas, je sortais le lendemain. J’ai été déporté deux fois : c’est gratuit ! Je me suis retrouvé avec une baïonnette entre les deux yeux en Afghanistan, un revolver dans le dos en Jordanie, dix mitraillettes dans les côtes au Venezuela, aplati dans une école au Cambodge à 150 mètres d'une attaque des Khmers rouges... Chargé par un troupeau de buffles au Congo, attaqué par des hyènes en Inde... Pas de gourde, je buvais l’eau locale. Au Pakistan est arrivé ce qui devait arriver : une dysenterie m’a fait perdre douze kilos d’un coup, j’étais tombé à 52 kilos pour 1m77. Je pouvais faire le tour de ma taille avec mes doigts ! Certains parlent de chance, de baraka ou de bonne étoile. Je cherche encore le mot qui s’applique à mon aventure et m’a permis de retrouver les rives de la douce France.
Ce tour des hommes m’a conduit à aller vivre chez les hippies à San Francisco en leur temps, chez les bonzes à Bangkok, dans les écoles de yoga en Inde, chez les coupeurs de têtes à Bornéo, chez les trafiquants de pierres précieuses à Sri Lanka et à travailler dans un kibboutz en Israël, entre autre. De ces multiples expériences, j’en ai tiré la conclusion qui fait le titre de mon premier ouvrage ainsi que de mon film : « La terre n’est qu’un seul pays », idée qu’énonçait déjà au XIXe siècle un Persan du nom de Baha’u’llah.
J’ai vu de mes propres yeux le monde malade et dangereux que l’on connaît. Malgré tout, je reste confiant et je reviens persuadé que la paix est non seulement possible, elle est inéluctable.
Voilà la riche expérience d’une vie que j’ai envie de partager.
http://andre.brugiroux.free.fr/biographie.htm